Le Corsair 4.0 : le XJR made in Réunion Island
Le Corsair 4.0 : le XJR made in Réunion Island ! C’est fait. Fini? Non. Quand tu commences à toucher à ta moto, tu n’en as jamais fini. Mais j’ai laissé de côté mon impatience et j’ai travaillé avec méticulosité. Je n’ai pas lâché l’esprit « débrouille ». Non. Les cornières qui constituent mon support de plaque ou celui du phare additionnel viennent de la quincaillerie. Par contre, j’ai accepté de travailler avec des artisans quand j’étais incompétent, pour la sellerie et le garde-boue. Je suis un amateur et ce n’est pas mon métier. Par contre, j’ai l’amour du métier. J’ai donc appris à attendre.
Durant trois longues années, j’ai chiné des cartouchières en cuir ou un phare de vieux Peugeot antique, en ligne, sur les brocantes du Sud de la France ou dans les surplus militaires. Seuls de rares élus trouveraient naturellement leur place dans mon projet.
J’avais déjà modifié ce XJR de 2003. Au moins 3 versions successives. Une par an. Au début, cette base était assez ignorée. Et les adeptes du modèles m’insultaient parfois en ligne. On m’accusait d’outrage. Il ne fallait pas toucher à un XJR. C’était quoi ce délire de Corsair? On connaît la suite. Des XJR par dizaines dans les mags et sur le web.
Cependant, au fond de moi, je me sentais toujours un peu insatisfait. Et j’apprenais aussi un peu plus à chaque fois. Je voulais une moto brutale mais rassurante. Classe, mais un peu coquine. Pas trop à la mode, mais un peu quand même. L’idée, c’était qu’on ne sache plus trop si la machine était une antiquité mise au goût du jour ou une néo-rétro customisée à l’ancienne. Le temps m’a donné raison. Les chaînes de production Yamaha ne sortent plus notre bon vieux classique. Une bête capable de rivaliser avec des jeunes pouffiasses botoxées au plastique et à l’électronique, sans renoncer à sa nonchalance de cruiser intemporel. Un moteur puissant et linéaire. Une architecture aussi classique que le temple d’Apollon à Delphes. « Connais-toi toi même », était-il inscrit à son fronton.
Mon vieux Corsair. J’ai un peu vieilli avec cet avion de chasse en voie d’obsolescence. Mais il n’a pas dit son dernier mot. Il peut en remontrer à plus d’une prétentieuse, le vieux pirate. Je le connais bien. Je connais même sa version 98, en 1200. Je ne peux plus m’en passer. Parfois je lui fais des infidélités bien compréhensibles. Mais j’y reviens toujours. On se reconnaît entre XJR men. Ils m’en veulent un peu d’avoir trafiqué le monument. Mais la maison mère n’a-t-elle pas elle même succombé aux sirènes marketing de la récupération du design hispster, dernier pied de nez XJR avec l’ultime version? Le joli 1300 Café Racer à…allumage électronique. Une belle bête tout de même. Un collector de demain, n’en doutons pas.
J’ai donc pris mon temps. Désormais, je sais découper la tôle et la former à mes désirs. Je sais coudre depuis la Marine. Je me piquais les doigts sous les regards sévères des statues de Duguay -Trouin et de Jean Bart. Bien plus tard, j’ai peaufiné cette compétence avec mes bâches de 4X4. Aussi, j’ai toujours adoré travailler le cuir. Lors d’un de mes nombreux déménagements, j’ai laissé un petit fauteuil club années 60 sur le trottoir. Il ne faut jamais regretter. Je ne vais pas te mentir : j’en suis juste malade.
Bref, il y a beaucoup de réminiscences, de souvenirs dignes de la petite madeleine de Proust dans cette ultime version d’une de mes motos fétiches. La ceinture de réservoir vient d’un grand oncle légionnaire. Tu peux crier au sacrilège. Mais penses-tu vraiment que ce warrior aurait préféré que la sangle qui lui avait tenu l’estomac en Indo reste à moisir dans une malle sous les combles? Ou qu’elle affronte les intempéries sous les tropiques?
Le rése, je l’ai poli des heures durant. Il y avait 3 couches de peinture différentes! Cette fois, j’ai même attendu que les multiples couches de vernis sèchent avant de rouler avec ! J’ai aussi nettoyé la bécane intégralement à la WD40, et j’ai récuré les tubes d’échappement qui s’oxydaient sous les couches successives de peinture HT. Dans l’ordre : chrome, noir et enfin blanc !
Les caches latéraux en cuir. Une pure trouvaille, non? Fin il’appel d’air et les turbulences de ma tôle percée. On va gagner 3 km/h et en plus c’est classe. Ces boots, j’en ai vu avec elles. Désormais elles resteront avec moi, jusqu’au bout de la route. Depuis, j’ai vu une apparition de caches latéraux en cuir sur le stand Triumph à Rome. C’est que je ne faisais pas fausse route alors.
L’étui pour transporter de manière illégale un de mes nombreux couteaux Laguiole? Acheté à la boutique de la base de Lanveoc-Poulmic en 1993, juste devant le hangar du porte-avion Charles de Gaule alors en construction dans le plus grand secret. Je lui avais pyrogravé (ce n’était pas encore la mode) une petite ancre marine. Le tout présente des cuirs de couleurs variées. Mais la couture jaune reste la même que sur la selle réalisée par Mat, et se marie si bien avec les Öhlins. Idem pour les coutures des cartouchières. Celle de droite ressemble à un modèle Lebel de 1906. Pourtant, la patte de fermeture est trop courte et taillée en biseau. J’ai donc un léger doute. Le gars qui me l’a vendue un bras prétendait que cela venait d’Amérique du Sud. Du coup, mon imaginaire s’enflamme quand j’y range mon petit sac fourre-tout ultra compact.
Tu comprends? C’est mon âme qui roule, là. Si un salopiaud me vole un morceau de cuir, c’est un lambeau de ma mémoire qui fout le camp pour de bon. Aucune assurance ne peut remplacer cela. Mais les voleurs se foutent pas mal du cordon ombilical qui nous relie de manière immémoriale à notre machine culte. C’est là leur véritable barbarie. Tu le sais bien, toi aussi.
J’ai pris du temps aussi pour trouver la guidoline de vélo adaptée. Le porte clé en cuir, acheté autrefois dans une boutique de Grand Luxe, a lui aussi une histoire que la décence m’interdit de narrer en détail. Il attendait, fatigué et cassé, dans un de mes bacs à outils magiques. J’ai jugé bon de le ressusciter pour la cause. Il se partage la route avec celui que mon pote Jimmy m’a brodé avec amour du métier.
Il reste tant de détails. L’alimentation du phare additionnel est autonome. C’est juste en cas de panne du principal. La batterie est étanche. C’est garanti par le cahier des charges des anciennes lampes frontales de l’armée suisse. J’ai disséqué la chose. Ce sont les vis de fixation qui font contact. Admirable. Mais j’ai sacrifié le tout pour ne garder que le petit container et son câble. Avec ampoule de rechange d’époque intégrée, s’il vous plaît.
La lanière de fixation de la frontale suisse est venue sangler mon cul de selle en tôle. Rien ne se perd !
Elle est reliée à une autre lanière. Une relique de l’ex RDA. J’avais acheté le sac de 50 litres juste pour pouvoir la posséder. Elle a enfin trouvé sa vraie place.
Au bout de celle-ci, le rabat d’une pochette cuir réalisée à la main et sur mesure par un artisan reçoit discrètement le hideux gilet jaune fluo imposé par la Sécurité Routière. Sous le capot, j’ai fixé une tôle bien propre qui reçoit le faisceau simplifié, peut supporter une belle trousse à outils, et qui fait office de garde-boue AR, avec l’aide de a plaque d’immat, elle aussi personnalisée en ligne (aux anciennes côtes, il ne faudrait tout de même pas pousser). Bien entendu, le support de plaque est conçu sur mesure et assemblé à la main. Pas besoin de changer les cat eyes made in China. ILs adorent leur nouvelle toiture en tôle découpée maison. Le rebord, c’est du bon vieux protecteur de portière, de plus en plus difficile à trouver dans sa version chromée.
J’ai beaucoup insisté sur la finition des clikos. Ils sont en métal, de gros bullet de facture classique. C’est de l’after market HD ! Mais je voulais qu’ils flottent un peu dans l’espace. Ils sont fixés à des montants de cadre que les préparateurs s’empressent de meuler. Sur la version stock, ils servent à fixer les affreuses culottes de cheval en plastique du XJR. Je les ai gardés et leur ligne vient dessiner un peu plus l’impression d’élégance que j’ai tenté de dégager de cette masse de muscles. Les fils sont masqués par la guidoline.
Je n’ai pas touché au pot Léo Vince. J’ai juste repeint en soulignant son nom. Les copains veulent que je le raccourcisse. Mais il sonne parfait et marche si bien. Et il ne dépasse même pas ! Les mauvaises langues, lesquelles ne savent souvent pas changer une bougie, lanceront alors que le cul est trop long. C’est oublier mon amour pour les carrosseries démesurées des belles voitures qui passaient quand j’étais petit garçon. A l’époque, les gens s’arrêtaient au feu rouge, le croiriez-vous ! J’ai même poussé le vice jusqu’à remettre la chicane dans le silencieux. Comme je suis à moitié sourd avec les turbulences, je n’entend même pas la différence !
Pour l’unique rétro réglementaire, un néo vintage assorti aux boucles qui trainent un peu partout apporte sa petite touche steam punk. C’est livré avec amour par Run-Accessoires. Faut-il encore présenter l’énorme boulot de Run Iron Works pour le garde-boue, avec ses attaches en alu moulées à la main?
Bon, il y aura bien un ou deux trucs encore à modifier. Je vais peut-être craquer pour des soufflets de fourche. Cela tombe bien car il faut changer les tubes. Et puis aussi des durites avia, ce serait plus raccord. Mais c’est une autre histoire…celle du Corsair 5.0 ?
A bientôt pour le versant techno-bricolo de cet article.
Et d’ici là, bonne route !
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4 commentaires
Francky
Super boulot, hâte de venir voir en vrai 🙂
Clay
Merci mon Francky !!! Faut qu’on la baptise à la Kékette !
L'Atelier du Vespa Vintage
Super taf poto ! bravo !
Clay
Venant de toi c’est un pur compliment : merci mon dalon ! Merci aussi pour les conseils bien utiles 😉