Le Thruxton de Damian
La dernière fois que j’ai eu affaire à une Triumph, c’était un samedi soir, lorsqu’un gars en Speed tentait de me provoquer en se tapant la Chaussée Royale sur la roue arrière. Mouais. Une évolution du scooter en plastique. Juste le permis et le crédit en guise de transition. On est loin de l’époque où, en vacances dans une famille du Kent, j’attendais avec impatience le petit ami de ma correspondante anglaise. Ou, plus exactement, sa Bonneville toute noire et dépouillée. Ce gars avait une méthode infaillible pour chasser les gens qui tentent de vous vendre une secte, le samedi midi, quand vous êtes bien tranquille avec une bière brune tiède à 3,5% et un pot de peanuts. Il sortait son bras par la fenêtre, agitait deux doigts en gueulant « Piss Off bastards! ». Ils n’insistaient pas et s’en allaient sonner chez le voisin. La fille descendait l’escalier typique, avec une grande mèche de cheveux bleus, un kilt et des Doc Martens montantes, et elle disait « Byyyye! » sur un ton nonchalant. Le gars enfilait son cuir bardé de renforts boudinés et de clous, avec un patch Motörhead dans le dos. Il déposait sa boîte de bière sur la table du salon. Nous, avec les parents bien propres sur eux avec leur petit gilet, on restait à regarder Laurel et Hardy en descendant des bières et du thé. Après un bon coup de kick, la Triumph filait en pétaradant.
Alors quand Damian m’a montré fièrement le Thruxton qui défilait dans sa tablette et qu’il venait d’acquérir, j’ai pas mal de bons souvenirs qui ont refait surface. Damian est un grand pro dans son job. Et c’est un plaisir de le voir bosser. Précis, rigoureux, efficace et pourtant cool. Et bien vite, il m’a parlé de son projet de préparer son anglaise. Et bien vite, comme avec toutes les vraies anglaises, il a eu des problèmes. Cela venait sûrement de l’électronique. On ne le répétera jamais assez. Vouloir plugger une moto sur un port USB, c’est comme manger le Christmas pudding sans le faire flamber: juste une hérésie. Mais bon, hein, faites ce que vous voulez. Bien entendu, j’ai orienté notre ami vers mon gang de rois de la clé de 10: Nickel Moto. Et j’ai bien averti Damian: il ne faut pas contrarier Jean-Marc.
Comme tout le monde, moi le premier, il a quand même voulu tester, en proposant humblement quelques suggestions TECHNIQUES. Résultat du test « Tu prends ta meule, tes cliques et tout le reste, et tu dégages! » Il ne FAUT PAS. C’est tout. Pas la TECHNIQUE liée aux MOTEURS. Pour le reste, on peut tout faire en cachette à la maison. Jean-Marc va se moquer, mais il sera le premier à reconnaître si c’est joli. Mais comprenez-le: tant de gens ont depuis si longtemps voulu lui apprendre son métier. A se demander pourquoi ils viennent le voir, s’ils ont le diagnostic, la compétence et le coup de main…
Damian, lui, il a vite compris. Puisque la mécanique, ce n’est pas son métier, il a su rester zen et faire confiance au King Keumard. C’est comme dans les contes zen, vous voyez. Dans Le Zen dans l’art chevaleresque du tir à l’arc, Herrigel nous raconte comment il s’est fait claquer la porte au nez par un vieux maître pire que Tortue Géniale, avant d’avoir, après beaucoup d’obstination, eu le droit de toucher une pauvre flèche. Avec le Keum, c’est pareil. Votre patience et votre humilité sont testés, non sans humour. Et Damian fut vite récompensé. Après quelques modifications de routine sur ces saletés de systèmes modernes et un dernier truc qui faisait pisser l’essence hors du résé, la bécane s’est mise à tourner.
« Clay, la bécane de ton pote, t’as écouté un peu la sonorité? Elle mouline comme une reine celle-là. » Damian, si tu lis ces lignes, saches que c’est là un compliment sincère et plutôt rare: tu es validé 😉 Alors voilà où nous en sommes. Damian roule avec tous les jours, ce qui n’est pas une évidence pour certains propriétaire de Triumph à la Réunion. « Tu comprends, il pleut… », « Tu comprends, y a trop de bouchons… », « Tu comprends, y a trop de vent… ». Vous les reconnaîtrez aisément. Ils font beaucoup de bruit, même le moteur éteint, et vous regardent de très très haut. En fait, juste ils ne vous voient pas, les gars, à vrai dire! Mais il existe un test suprême pour les confondre. La fausse affirmation piège:
« -Dis donc, Triumph man, les japonais, ils ont quand même assuré quand ils ont sorti la Bandit.
-Oh, mouhais…ça reste une japonaise, hein! Rien ne vaut les anglaises! »
On te tient imposteur! En 1971, Triumph sort une moto qui ne sera pas produite, la 350…Bandit. Anglaise la première Bandit! Eh ouhais! Pour une fois, je vous l’accorde, le génie n’est point nippon! Mais pas besoin de creuser aussi loin. Ils ne savent même pas qu’il n’y a pas si longtemps, leur marque fétiche avait des carburateurs!
Revenons à Damian et à son Thruxton. Il roule avec. Et il commence à le modifier. Et il y pense. Et cela ne s’arrête plus. Donc, là on va vous le présenter en l’état, et cest déjà plutôt chouette. Mais quand il aura fini (on n’en finit jamais, hein) son projet, nous verrons la mise à jour ultime, sans bandes café racer, avec une autre peinture et pas mal de modifs, et surtout, nous y adjoindrons une vidéo avec la p’tite musique du moteur brit!
En attendant, on va se rincer l’oeil!
Et pour finir, bien entendu, le fameux questionnaire Claymotorcycles!!!
- 1.Années de pratique : je suis un rookie, je ne fais de la moto que depuis 2 ans!
- 2. Motos passées et présentes : pour le moment une seule moto: ma Thruxton. Mon père, par contre, en a toujours eu, et j’ai pu rouler avec lui pendant mon enfance en Californie. De tête, il a toujours de grosses japonaises comme des Honda CB et des Kawasaki.
- 3. Ma moto préférée : je suis fan de café racers notamment les anglaises comme les Vincent HRD ou les Norton. Disons une Egli-Vincent Godet comme celle-ci me dirais bien!!!
- 4. Pourquoi la moto ? La moto évoque en moi plusieurs émotions: la mécanique pure et dure, l’esthétique, la vitesse (même si je roule comme un papy), le contact avec les éléments (bruits, odeurs, le vent), Et bien sûr, les filles adorent…
- 5. Ma plus belle histoire de motard : Vu que j’ai peu de pratique, je n’ai pas beaucoup d’histoires à raconter; mais le tour du désert autour de Las Vegas avec mon père il y a un an c’était fantastique! (même s’il y a eu déshydratation et perte de connaissance). Faire le Nevada en Harley, c ‘est l’Amérique la vraie!!!
- 6. Ma pire expérience de motard : la encore, pas beaucoup a dire car les rookies n’ont pas beaucoup d’histoires…
- 7. Ce que je préfère : rouler le soir, sans circulation, tout seul.
- 8. Ce qui m’énerve : la pluie, la pluie, la pluie!
- 9. L’avenir de la moto : En ce qui me concerne l’avenir c’est une vieille bécane qui sentira l’huile, qui ne sera pas trop fiable, mais qui sera légendaire.
- 10. La moto en un mot : comme évoqué avant: la moto, c’est les sensations et la beauté!
Voilà, comme vous le voyez, Damian ne se la raconte guère, même s’il a bien plus à raconter qu’il ne le croit. Il a bien mérité son patch de membre du Cercle de l’As de Pique! De toute façon, avec une telle bécane, il va vite lui arriver plein de choses (que du bonheur, bien sûr!), et surtout, il nous racontera bientôt comment il l’a encore rendue plus belle.
Merci Damian pour ta confiance et ta gentillesse, et à très bientôt sur la route, pour un ride nocturne!!!
Et si vous aimez les beaux Thruxton, il y a aussi celui-ci dans notre garage de potes: https://claymotorcycles.com/2014/02/le-cafe-racer-de-francesco/
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Un commentaire
Damian
Merci super article!!