Scout toujours!
Attention : j’ai la joie de partager avec vous un document rarissime ! Pour les jeunes qui se lancent dans l’aventure des vieilles meules, et pour les anciens, à qui cela va rappeler des souvenirs. Nous sommes en 1961 : comment démarrer au kick ? Et que faire quand rien n’y fait ?
Le kick: ce coup de jarret relève à la fois de la mécanique des pièces, de celle des fluides et de la chimie la plus explosive. Le démarrage au kick, c’est le paradoxe d’un protocole très rationnel qui, pourtant, ne peut fonctionner qu’avec l’intuition sensible, l’expérience des démarrages passés, et la découverte toujours inédite du démarrage à venir. Oubliez ce maudit bouton rouge, pauvre contact « on /off ». Union du corps, de l’esprit, de la machine et du public, le démarrage au kick, en ce qu’il réclame de doigté, de force brute mais contenue, et de sens du timing, déclenchera toujours autour de vous, et ce, quelle que soit la cylindrée, l’admiration des foules urbaines, lesquelles n’ont jamais oublié l’émerveillement enfantin face aux spectacles de magie.
Mais en guise de préambule, on ne va pas se voiler la face plus avant : entre autres activités troublantes, par le passé, votre serviteur a été scout. Attention, hein, je n’ai jamais obtenu le moindre grade, ni la moindre récompense, à cause de mon indiscipline. Le camp se résumait à se retenir de déféquer pour ne pas avoir à affronter un trou creusé à même le sol, caché sous une tente et un nuage de mouches. J’ai aussi réussi à passer 10 jours et 10 nuits complets sans retirer mes bottes en caoutchouc (super entraînement pour rouler de longues heures avec des boots de motard trempées)! Sinon la grande aventure consistait à espionner le chef sortir au petit matin de la tente des cheftaines (super entraînement pour heu…), et à vendre des calendriers avec un baril de lessive en carton sur la tête en guise de heaume médiéval (super entraînement pour le casque de moto !).
Je suis méchant. Le chef nous emmenait faire de la descente de prairie sans ceinture avec sa 2CV, et ça, de nos jours, ça lui vaudrait la correctionnelle, mais à l’époque, c’était juste énorme ! Ces suspensions, bon dieu !
Tout cela pour vous dire que je suis tombé par hasard sur un vieux magasine scout (pas sur un mag de scoots, hein !). Et alors ce fut la révélation : j’avais commencé ma carrière de louveteau bien trop tard. Il fut un temps où les chefs scouts savaient parler aux jeunes, aux vrais. Combien de vocations de blousons noirs ont-ils suscités malgré eux ? Mes amis, nous sommes ici en présence d’un pur tutoriel moto âgé de 53 ans.
Comment démarrer au kick ? Et que faire quand rien n’y fait ?
Put… c’est génial ! Et plus besoin d’aller puiser dans la littérature US fascinante mais quelque peu passéiste pour retrouver nos racines. Ici, on a du condensé de motard frenchie classieux. C’était l’époque de De Funès et de Monsieur Hulot. Les bécanes 125 étaient de petites horloges. En retranscrivant pour vous ce petit joyau, j’avais presque les larmes aux yeux, mais avec le sourire. Mes premières tentatives cauchemardesques pour réveiller ma RD50 à coups de kick ! Ma première gamelle dès les premiers 4m dans le gazon du jardin familial ! Les courses éreintantes en descente, où on saute sur la grosse selle pour faire hoqueter lemoteur qui finit par se rendormir. Je vous laisse juge : vous trouverez ici des conseils qui fonctionnent toujours pour votre Royal Enfield, ou pour le Dax 125 Claymotorcycles (voir Post « La vie en Dax) avec simplicité, classe et bonne volonté. « Hey, c’est quoi ton totem ?… »
La moto « 125 cm3 »
vous est présentée et expliquée par Jean Latappy.
(Extrait de la revue « Tout droit » n°3 de 1961.)
-Mettre en ordre de marche une motocyclette ou un scooter.
-Savoir déceler une panne courante et y remédier.
-Nettoyer ou changer les bougies
-Démonter et nettoyer le carburateur.
Les motos de 125 cm3 n’exigent pas la possession du permis de conduire. Cela ne les empêche pas d’être rigoureusement semblables dans tous leurs éléments à meurs sœurs plus puissantes qui nécessitent l’obtention du fameux carton rose.
Une 125 cm3 pèse facilement, à vide, 80 kg. Ne prenez pas prétexte de cela pour la laisser reposer sur sa béquille lors de la mise en marche ; lorsque vous appuierez sur le kick de départ, la machine serait facilement déséquilibrée, et vous risqueriez de la voir se coucher. De plus, la béquille n’est pas faite pour cela et vous lui feriez encaisser, en plus du poids de votre machine, des distorsions fâcheuses (elle est fort étroite).
Donc, vous avez d’une main pris le guidon, de l’autre le porte-bagage, et poussant votre moto en avant, vous l’avez descendue…de son piédestal qui, automatiquement, s’est rabattu sous le moteur.
Vous ouvrez votre robinet d’essence. Vous vous penchez vers votre carburateur, il dispose d’une cuve d’où dépasse une très courte tige. Vous appelez l’essence en l’enfonçant très brièvement (plusieurs petits coups secs plutôt qu’un longuement appuyé). Ne noyez pas votre carburateur en insistant exagérément. Il est muni d’un volet d’air, vous le mettez en position fermée. Cela enrichit le mélange, la proportion d’essence y étant alors prédominante et facilitant le départ à froid. Vous vérifiez soigneusement que votre boîte de vitesse ne se trouve pas embrayée sur un rapport quelconque, qu’elle est bien au point mort (pour cela, prenez toujours l’habitude rigoureuse d’y revenir lors d’un arrêt, alors que souvent, ayant débrayé et stoppé le moteur, vous êtes tenté de n’y plu songer).
Vous tournez alors votre poignée de gaz, assez, mais pas trop. Vous vous tenez à côté de la machine, du côté du kick, la main sur la poignée tournante et vous appuyez du pied droit sur le kick. Vous aurez dans cette position plus de force. Pour un départ à froid : vous commencez à enfoncer votre pédale de kick 3 ou 4 fois doucement, cela permettra à votre cylindre d’aspirer le mélange, ainsi que de le « dégommer ».
Après quoi, vous appuyez d’un coup sec. En principe, cela « doit » partir. Sinon…vous recommencerez. Aussitôt la première pétarade sortie de votre pot d’échappement, donnez un peu plus de gaz, sans pour autant emballer votre moteur. Il vous en sera reconnaissant (vos voisins aussi). Vous le laissez tourner ainsi quelques instants, le temps qu’il se réchauffe, en stabilisant votre poignée de gaz un peu avant le point exact où vous sentez que votre moteur va s’arrêter. Ouvrez le volet d’air à nouveau -ne l’oubliez pas-, mais en donnant cependant encore un peu plus de gaz.
Vous n’avez plus qu’à enfourcher votre monture, débrayer, passer votre première, embrayer progressivement en gardant suffisamment de gaz à la poignée pour que votre moteur ne cale pas. Juste équilibre à trouver et à conserver. Si vous emballez, vous ferez un départ brutal, vous meurtrirez votre embrayage et vos pignons.
Aussitôt la machine démarrée, entraînez-vous à ramener vos pieds sur les repose-pieds le plus vite possible au lieu de zigzaguer en « ramant » sur le sol avec vos jambes. Il vous suffira de bien surveiller votre guidon et surtout votre route, de donner un peu plus de gaz pour stabiliser votre trajectoire. Passez votre seconde aussitôt que votre machine aura suffisamment d’élan, le bruit d’un moteur qui tourne trop vite se dérobe en première affole toujours un débutant. Vous retrouvez plus de calme aussitôt sur le rapport supérieur, la troisième ensuite. Si vous êtes obligé de ralentir, de rétrograder de vitesse, apprenez dès le début à faire double débrayage. Votre boîte vous en saura gré, votre conduite sera moins heurtée. Cela consiste à débrayer, passer au point mort, puis embrayer, accélérer votre moteur pour le mettre à la vitesse du rapport inférieur, débrayer à nouveau, passer votre vitesse, embrayer définitivement cette fois. Compliqué au début, bien sûr, cela devient vite un simple réflexe.
N’oubliez jamais que votre « 125 cm3 » sans permis de conduire peut rouler à 80 km/h. A cette vitesse, freiner sur deux roues pose par contre plus de problèmes. N’abusez pas du frein arrière ; ou même à grande allure, ne vous en servez pas, vous bloquez votre roue, votre roue arrière se dérobe, vous dérapez. C’est le frein de la dernière chance qui vous permettra d’appuyer, si besoin est, l’efficacité de votre frein avant auquel vous devez toujours avoir recours en premier.
MAINTENANT, il se peut que votre moteur soit résolument décidé à n’émettre aucun son au moment du départ. Soyez patient et procédez par ordre. Vous avez pu noyer votre carburateur. Attendez que le trop plein s’écoule. Ou fermez votre robinet d’essence et faites absorber le surplus par le moteur par quelques coups de kick. Votre bougie est peut-être sale (souvent sur les moteurs à deux temps). Dévissez-la, nettoyez-la dans de l’essence ou mieux encore avec une petite brosse métallique qui enlèvera les dépôts. Toujours pas d’explosion ? Peut-être votre carburateur n’est-il pas très propre et le gicleur se trouve-t-il bouché ? Nettoyez-le de temps à autre. Cela vous évitera cette corvée au moment précisément où vous avez besoin de démarrer. Un carburateur de moto légère est simple. Le gicleur se trouve au-dessus de l’écrou fixant la cuve sur le corps même du carburateur. Son accès est immédiat sitôt ces deux parties séparées l’une de l’autre. Il ne sera pas inutile de vérifier parfois par la même occasion si votre essence s’écoule bien du réservoir vers votre carburateur, les dépôts laissés par l’essence peuvent s’être accumulés sur la fine grille qui forme filtre à votre robinet d’essence. Déconnectez votre tuyau, videz votre réservoir dans un bidon, démontez le robinet t nettoyez. Soufflez dans le tuyau pendant que vous y êtes.
Maintenant que vous êtes sûr que tout va bien du côté de l’admission, si vraiment votre moto demeure muette, et que la bougie n’est pas à incriminer, c’est votre volant magnétique qui s’est déréglé, ne produisant pas l’étincelle au moment exact qui convient : le réglage est simple, l’accès aisé-un tournevis vous suffira pour agir sur une première vis de blocage du système, puis sur une deuxième qui modifie l’amplitude du contact. N’omettez pas, l’opération terminée, de rebloquer votre réglage redevenu correct.
Et puis si tout cela ne sert à rien, ou même avant d’avoir épuisé toutes ces possibilités de pannes, vous avez toujours la ressource de vous armer de courage, de courir à côté de votre machine, 2°vitesse passée, et non la première, une main sur la poignée de débrayage actionnée, l’autre sur celle des gaz, vous vous lancez ainsi, en poussant votre machine. L’élan acquis, vous embrayez, votre moteur démarre enfin. Vous débrayez aussitôt, en donnant encore plus de gaz, passez au point mort le plus vite possible. Vous laissez tourner. Ou bien aussitôt le moteur démarré, vous sautez en voltige sur la selle, pour continuer en seconde sans avoir débrayé. Cela certes donne un surcroît de charge à votre moteur récalcitrant, mais cela peut aussi (un mouvement, celui de votre moto lancée, en entraînant un autre, celui de votre moteur embrayé sur roue) le « dégeler » efficacement. Il va s de soi qu’en descente, ce dernier résultat est encore meilleur. Et maintenant, bonne route !
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